Vicky Carbonneau – dite Kiki – est une passionnée de vélo. Arrivée en France depuis le Québec il y a douze ans, elle multiplie les projets autour du deux roues. Le 7 juillet 2022 elle a publié son premier livre, « En danseuse – Ces femmes qui révolutionnent le cyclisme » aux éditions Amphora. Dans ce beau livre, elle revient sur toutes ces femmes qui ont marqué ou marquent le vélo, que ce soit dans le sport, pro ou amateur mais aussi dans la vie professionnelle. Puisque nous avons adoré son livre et qu’elle n’y ‘a pas fait son autoportrait, nous avons posé quelques questions à Kiki !
Roulez Jeunesse : Fondatrice d’une communauté de femmes à vélo (Girls on Wheels), cofondatrice d’un café vélo, collaboratrice chez “Elles font du vélo”, associée de la marque Wilma et maintenant autrice. D’où te vient cette passion du vélo et de l’entreprenariat ?
Vicky : Ma passion pour le vélo est plutôt née en France, même si je me déplaçais pas mal à vélo à Montréal lorsque c’était possible. Lorsque je suis arrivée à Paris, je me suis achetée un vélo, un pignon fixe, et ça m’a ouvert à plein de communautés et j‘ai vite pris plaisir à découvrir Paris et sa banlieue au fil des coups de pédale. Et petit à petit ça m’a mené de plus en plus loin et j’ai eu envie de partager cette passion, cette liberté et cette indépendance avec d’autres femmes.
Pour le côté entrepreneure, c’est peut-être un peu culturel. J’adore participer à la création et l’évolution de petites entreprises. Il y a tout à faire, c’est un sacré challenge. Lancer mon propre café-vélo vient du plaisir d’accueillir les gens, partager et découvrir les multiples facettes de ce sport et de la région du Ventoux, et d’être son propre patron.
Roulez Jeunesse : Pourquoi c’était important pour toi ce livre ? Qu’est ce qui t’a poussé à t’intéresser à toutes ces femmes ?
Kiki : Je suis impliquée dans le cyclisme féminin depuis environ 8 ans, pour faire avancer les choses à mon petit niveau. Avec la création des Girls on Wheels, je me suis toujours dit que si je pouvais mettre ne serait-ce qu’une femme à vélo et l’aider à faire son premier 100 km, ce serait déjà gagné pour moi. L’idée du livre m’est venue tout de suite lorsque je me suis aperçue qu’il y avait un grand vide dans la bibliothèque du cyclisme féminin. Il n’y a que très peu d’ouvrages qui parlent de ces championnes du cyclisme et qui mettent en avant les femmes dans l’univers du cycle. Plus il y aura de médiatisation, plus on s’intéressera à ce sport au niveau pro et amateur que ce soit pour le développement de produits leur étant destinés ou pour tout ce qui est sponsors, salaires et droits des coureures. La médiatisation permet aussi aux filles de s’identifier à ces femmes et de se dire qu’elles peuvent aussi faire de la compétition ou un métier dans l’univers du cycle.
Roulez Jeunesse : Parmi les 35 portraits réalisés, tu pourrais nous dire quel est le témoignage qui t’a le plus touché ou marqué ?
Kiki : Chaque portrait est différent et j’ai adoré découvrir chacune d’entre elles. Elles ont toutes leur parcours et c’est ce qui rend la chose intéressante, ça montre qu’on peut faire ce qu’on veut peu importe l’âge, le sexe, l’expérience passée. Il s’agit de persévérer. La première avec qui j’ai discuté c’est Audrey Cordon-Ragot. Je l’ai trouvée super accessible et tellement gentille de prendre le temps de répondre à toutes mes questions. Avec Katelle et Christelle j’ai eu beaucoup de frissons, elles sont des forces de la nature. Maëlle m’a fait vivre une course de l’intérieur et c’est là que tu vois que ce n’est pas du tout la même chose que voir la course à l’écran. Puis Kabriole qui est si vraie lorsqu’elle me parle de son monde de la street. Chacune m’a marquée.
Roulez Jeunesse : A travers toutes les femmes que tu racontes, on voit l’étendue du monde cyclable : coureures pros, pistardes, paracyclisme, VTT, BMX mais aussi mécaniciennes, coursières… c’était important pour toi d’être la plus inclusive possible ?
Kiki : On associe souvent le cyclisme au vélo de route et à la performance. Même chez Pista parfois des gens arrivent en vélo touring et me disent qu’ils ne se considèrent pas comme cyclistes. Je leur explique que le vélo ne se limite pas à faire 30 km/h de moyenne en vélo de route, qu’il y a plusieurs pratiques. Le cyclisme c’est tout un univers. Dans le livre j’ai voulu inclure plusieurs disciplines et métiers, et mélanger aussi celles qui sont pros et amateures. Il me faudrait un deuxième livre pour parler de celles que je n’ai pas pu inclure comme l’ultra, gravel, le bike polo, le monocycle… Et un troisième, quatrième, cinquième… livre pour parler de chaque pratique en profondeur 🙂 ha ha!
Le vélo ne se limite pas à faire 30 km/h de moyenne en vélo de route, il y a plusieurs pratiques. Le cyclisme c’est tout un univers.
Roulez Jeunesse : Tu as posé la question à presque toutes les femmes avec qui tu as discuté. Si tu devais résumer, comment motiver les femmes à se mettre au vélo, que ce soit en pratique quotidienne, pro ou en métier ?
Kiki : Ne pas hésiter et faire ce qu’on a envie de faire. Se lancer et foncer ! Voilà ce qui ressort le plus. Et pour celles qui hésitent, il y a de nombreux groupes féminins qui sont là pour amener les femmes à pédaler où on se sent à l’aise de poser des questions. Rejoindre des communautés de cyclistes, il y en a dans toutes les régions maintenant, ça aide à découvrir ce sport et à ne pas être seule.
Roulez Jeunesse : Quels seront les éléments dans les 10 prochaines années qui permettront de voir que la féminisation du vélo est un succès ?
Kiki :
-Que l’offre vêtements cyclistes et produits pour femmes ait grandement augmentée.
-Qu’on accorde autant de pages sur le sport féminin que pour le sport masculin dans les médias papiers et sur internet. Car on a remarqué que pour le Tour de France homme, des onglets sur les sites web s’étaient créés et étaient dédiés au Tour hommes, mais la même chose n’a pas été fait lors du Tour femmes qui se trouvait mélangé dans les actualités sportives.
-Que sur les courses amateures (cyclo, gravel ou ultra) on ait presque la parité en nombre de participantes que de participants.
-Qu’il y ait autant d’équipes professionnelles féminines que masculines, qu’elles soient aussi grosses et avec le même budget.
-Que les salaires des professionnelles soient égaux aux salaires masculins.
-Qu’on retrouve des femmes dans les postes dirigeants et à tous les niveaux des industries du cycle.
-Qu’on puisse acheter un vélo en choisissant une selle femme et non homme dès l’achat du vélo.
–Que les femmes ne se posent plus la question si elles ont leur place !
Roulez Jeunesse : Vu le nombre de projets que tu as mené jusque là, on imagine que ce n’est pas fini ! C’est quoi la suite ?
Kiki : J’ai toujours des projets, c’est comme ça que j’avance. D’abord faire grandir Pista, notre café vélo, il y a tellement de possibilités dans la région du Ventoux en ce qui concerne le cyclisme et le sport outdoor. Faire connaître davantage la super marque Wilma. Et j’ai aussi quelques idées qui me trottent dans la tête depuis longtemps autour du cyclisme féminin ou simplement du vélo. Je vais essayer d’en concrétiser au moins quelques-unes 🙂 Stay tuned! ha ha !!
Que les femmes ne se posent plus la question si elles ont leur place !
Merci à Kiki pour son temps, malgré la pleine saison au Pista Cycling Café. « En danseuse – ces femmes qui révolutionnent le cyclisme » est disponible aux éditions Amphora. On vous conseille cette belle lecture !