Nantes, la ville qui fut longtemps pionnière du vélo en France, voit ses concurrentes la rattraper et même la dépasser au Baromètre des villes cyclables 2025. Avec une note de 3,88 sur 6 (climat « plutôt favorable », classe C), la cité des Ducs se maintient dans le top 7 national mais sans la dynamique espérée.
Alors que Lyon grimpe à la 4e place avec une progression spectaculaire de +15%, Nantes stagne et voit d’autres métropoles lui ravir sa place de référence cyclable. Plongée dans les résultats d’une ville qui a tout pour réussir mais qui peine à concrétiser ses ambitions sur le terrain.
L’évolution de Nantes : de pionnière à suiveur ?
Un démarrage prometteur suivi d’un essoufflement
Les résultats de Nantes au fil des éditions racontent une histoire contrastée. En 2017, la ville décrochait une belle 2e place des grandes villes avec 3,71/6. Elle conservait cette position en 2019 malgré une note en baisse à 3,55/6 – premier signal d’alarme.
La chute intervient en 2021 : Nantes tombe à la 5e place avec ~3,6/6. La concurrence s’était intensifiée et d’autres villes avaient accéléré leurs investissements vélo. L’édition 2025 confirme cette tendance : note stable à 3,88/6 mais baisse au classement tandis que Lyon, avec ses 4,03/6, la devance désormais largement.
Le constat 2025 : une évolution trop modérée
Nantes n’a pas décroché – elle reste dans le top national de sa catégorie. Mais son score et son rang stagnent quand d’autres villes progressent fortement. Cette relative immobilité souligne qu’une marge de progression importante reste à conquérir pour rattraper Grenoble (4,37), Strasbourg (4,15) ou Rennes (4,05).
Pour contextualiser ces résultats dans le paysage national, consultez notre analyse complète du Baromètre des villes cyclables 2025 qui décrypte tous les grands gagnants et perdants de cette édition.
Ce que reprochent les cyclistes nantais
Le réseau cyclable : trop de trous dans la raquette
63% des répondants nantais classent la réalisation d’un réseau complet et sans coupure parmi les trois actions prioritaires. Ce chiffre illustre l’attente forte d’itinéraires cohérents, sans maillons manquants dangereux ou détours décourageants.
Plus de la moitié des participants dénoncent le manque d’aménagements cyclables satisfaisants, réclamant des itinéraires continus et directs. Les cyclistes nantais connaissent bien ces frustrations : une piste qui s’arrête brusquement, un carrefour dangereux à franchir, un détour imposé parce que l’itinéraire direct n’est pas aménagé…
La sécurité : toujours le point noir
Le sentiment d’insécurité reste élevé, notamment aux intersections et sur les axes partagés avec des véhicules motorisés. Au niveau national, 64% des répondants jugent que les conditions de circulation à vélo demeurent mauvaises – un indicateur qui reflète aussi le climat nantais.
La vitesse et le comportement de certains automobilistes (dépassements trop serrés, stationnements sur bandes cyclables) sont pointés du doigt comme sources d’insécurité quotidiennes. Pour beaucoup de Nantais, les conditions ne sont pas encore réunies pour se déplacer sereinement à vélo à tout âge.
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Confort et entretien : peut mieux faire
Les cyclistes nantais appellent à des aménagements de meilleure qualité et mieux entretenus. Lors de l’édition 2021, Place au Vélo (l’association locale d’usagers) notait que les nouvelles bandes et pistes manquaient souvent de qualité de réalisation : largeur insuffisante, protection médiocre, revêtement approximatif.
Le baromètre 2025 confirme ce besoin : près de la moitié des répondants demandent un entretien accru des pistes existantes. Marquages visibles, absence d’obstacles, revêtements sans nids-de-poule : autant de conditions nécessaires pour un confort de roulage satisfaisant.
Le stationnement : le parent pauvre
Les cyclistes peinent à trouver des arceaux sécurisés en nombre suffisant, notamment près des lieux stratégiques : commerces, écoles, gares. Ce déficit est problématique car la crainte du vol reste très répandue – un frein majeur à la pratique.
À l’échelle nationale, 1 344 emplacements ont été signalés comme prioritaires pour le stationnement vélo. Nantes ne fait pas exception : abris vélo en gare et parkings sécurisés jugés insuffisants par de nombreux usagers.
Pour protéger efficacement votre monture à Nantes, consultez notre guide sur comment bien choisir son antivol vélo.
Les politiques cyclables récentes : beaucoup d’annonces, des résultats mitigés
Les fondations : zones 30 et coronapistes
Dès 2020, Nantes a généralisé le 30 km/h (sauf sur les axes principaux…) pour apaiser le trafic et sécuriser piétons et cyclistes. Une mesure socle importante pour réduire l’accidentologie.
Lors du confinement du printemps 2020, Nantes Métropole a déployé en urgence plusieurs « coronapistes » temporaires. Certaines ont été pérennisées suite à la concertation citoyenne « La rue pour tous » fin 2020. Ces aménagements expérimentaux ont démontré l’intérêt de reconfigurer rapidement l’espace public en faveur des modes actifs.
Le Schéma Directeur Cyclable : des ambitions XXL
En février 2021, le Conseil métropolitain a adopté un Schéma Directeur Cyclable ambitieux. Ce plan vise une véritable « autoroute vélo » métropolitaine structurée en quatre niveaux : axes magistraux, axes structurants, voies secondaires et maillages de proximité.
Les objectifs affichés donnent le vertige :
- Multiplier par quatre la part modale du vélo d’ici 2026 (passer de ~3% à 12%)
- 115 millions d’euros alloués au vélo sur 2021-2026
- 50 km de voies magistrales sécurisées d’ici 2026
- 640 km d’aménagements à terme sur l’agglomération
Parmi les projets phares, un axe cyclable express de 7,5 km entre Nantes et Couëron (via Saint-Herblain), vient d’être livré en septembre 2025.
L’écart entre planification et réalité terrain
Entre les plans sur le papier et la réalité vécue, un écart subsiste. Les avancées sont là : quelques pistes neuves, des double-sens cyclables supplémentaires, la piétonnisation de certaines rues du centre… Mais leur déploiement reste jugé trop lent et partiel par les usagers.
Sur les 50 km de voies magistrales promis d’ici 2026, seule une fraction est effectivement réalisée fin 2025. Plusieurs chantiers ont pris du retard. Le stationnement sécurisé évolue positivement comme avec le nouveau parking XXL à EuroNantes (1216 places !), mais la demande reste forte.
Les Pays de la Loire se distinguent d’ailleurs comme la première région cyclable selon le baromètre 2025, grâce à Nantes en moteur régional. Mais cette dynamique régionale ne suffit pas à masquer les lenteurs de mise en œuvre locale.
Nantes face à ses concurrentes : le réveil nécessaire
Lyon : l’exemple qui fait mal
Lyon a grimpé à la 4e place avec une progression de +15% et une note de 4,03/6. La ville a généralisé les zones 30, déployé ses Voies Lyonnaises structurantes, et traité des points noirs emblématiques. Résultat : les cyclistes lyonnais constatent des améliorations tangibles.
Découvrez comment Lyon a réussi sa remontée dans notre analyse complète de Lyon au baromètre 2025.
Paris progresse aussi
La capitale, malgré ses défis, remonte à la 11e place et passe en climat « plutôt favorable » (3,67/6). Les Parisiens reconnaissent les efforts d’aménagement, même si des points noirs persistent. Détails dans notre article sur Paris au baromètre 2025.
Lille revient dans le jeu
Lille effectue son come-back en intégrant le top 10 national (~3,6/6). Après un creux, la capitale des Flandres récolte les fruits de son apaisement de circulation.
Ces trois exemples montrent qu’avec de la volonté politique, les résultats arrivent vite. À Nantes d’en prendre de la graine !
Les leviers pour retrouver son rang de référence
Accélérer la réalisation des voies magistrales
Les 50 km prévus d’ici 2026 doivent devenir une priorité absolue. Chaque mois de retard creuse l’écart avec les villes concurrentes. Les cyclistes nantais attendent de voir ces axes magistraux sortir de terre massivement.
Traiter les points noirs en urgence
Le baromètre a permis d’identifier précisément les lieux dangereux. Ces 2 553 lieux à aménager nationalement comprennent de nombreux points nantais. Carrefours, ponts, accès aux gares : autant de sites à traiter en priorité.
Massifier le stationnement sécurisé
Installer des milliers d’arceaux supplémentaires, créer des parkings sécurisés aux pôles d’échange, des consignes dans les quartiers résidentiels. Le stationnement ne doit plus être le parent pauvre de la politique vélo nantaise.
Si vous habitez Nantes et souhaitez transporter des charges ou vos enfants, découvrez nos guides sur comment choisir son vélo cargo ou sur le transport des enfants à vélo.
Améliorer la qualité et l’entretien
Créer de nouveaux kilomètres, c’est bien. Mais il faut aussi maintenir l’existant : marquages visibles, revêtements de qualité, obstacles enlevés. Une piste mal entretenue décourage autant qu’une absence d’aménagement.
Vers 2026 : le vélo au cœur de la campagne municipale
Un enjeu électoral majeur
À six mois des élections municipales, le Baromètre 2025 arrive à point nommé. Il fournit aux habitants et militants un outil objectif pour évaluer l’action du mandat écoulé. Comme le résume la FUB : « À l’approche des municipales, ces données posent une question directe : le vélo est-il vraiment une priorité, ou seulement un slogan ? »
À Nantes, cette question résonne particulièrement. La ville a longtemps été pionnière mais d’autres la rattrapent voire la dépassent. Pour la majorité en place, c’est un encouragement à persévérer et accélérer. Pour l’opposition et les usagers, c’est l’occasion de revendiquer des mesures plus fortes.
Les attentes des Nantais à vélo
Plus de 6 000 Nantais ont répondu au baromètre, un chiffre record qui témoigne d’une demande sociale forte. Ces milliers de voix attendent des réponses concrètes : moins de communication, plus de réalisations sur le terrain.
Le climat cyclable de Nantes pourrait bien devenir un sujet majeur de la campagne 2026, alimenté par la richesse des enseignements du baromètre citoyen.
Conclusion : Nantes à la croisée des chemins
Nantes se trouve à un moment charnière. La ville dispose de tous les atouts : ambition politique affichée, budget conséquent (115 M€), schéma directeur structurant, et une région Pays de la Loire en tête du classement national.
Mais les résultats tangibles tardent à se matérialiser sur le terrain. Les cyclistes nantais constatent des progrès, certes, mais jugent le rythme trop lent face à l’urgence climatique et à la demande sociale croissante.
L’enjeu pour Nantes est clair : transformer rapidement les plans en réalisations concrètes. Sinon, la ville qui fut pionnière du vélo en France risque de devenir une simple suiveur, rattrapée par des métropoles plus réactives et volontaristes.
Le prochain baromètre (probablement en 2027) sera décisif. Soit Nantes aura su accélérer et retrouver son rang de référence nationale, soit elle continuera de stagner et de voir d’autres villes lui ravir sa place. Aux futurs élus de 2026 de faire le bon choix !
Pour comparer Nantes avec les autres grandes métropoles :
- Lyon : une progression spectaculaire
- Paris : entre progrès et défis
- Le classement complet du Baromètre 2025
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